Carte
blanche de Bernard Delville,
Président de la Fondation Kids and Wind
Président de la Fondation Kids and Wind
Blackout électrique, je ne connais pas ! ...
En cas de pénurie électrique, mon village de Mesnil Eglise en province de Namur, sera déconnecté du réseau d’électricité par le gestionnaire du réseau. Un comble, car les trois éoliennes construites par Vents d’Houyet sur les crêtes produisent surtout en hiver. Où ira leur électricité si la ligne est coupée? Et où ira l’électricité de tous les toits solaires du village ?
Cette situation exceptionnelle -la
pénurie- relance de façon inattendue le débat sur le développement des énergies
renouvelables. Les installations de production de basse et moyenne puissance
peuvent desservir les consommateurs de proximité.
Imaginez le réseau d’électricité comme un réseau routier. A Mesnil, l’électricité haute tension vient d’Hastière
par la Nationale jusqu’à à Finnevaux, disons le carrefour, et par des chemins
communaux arrive à chaque habitation du village. Elle est transportée par une
voie à sens unique qu’il est facile de bloquer. Ainsi, en cas de pénurie, le distributeur coupe le disjoncteur à Hastière et les chaumières de Mesnil et des environs basculent
dans le noir. Mais surtout, la ligne étant coupée l’électricité produite à
Mesnil si elle ne peut être consommée sur place, sera… i-nu-ti-li-sa-ble !
Pourquoi ? Parce que dans l’exemple
routier le réseau n’est pas à sens unique, on roule dans les deux sens. Un arbre tombé en travers de la nationale à
Hastière nous ferme l’accès d’Hastière
mais n’empêche pas d’utiliser le réseau routier en aval. Or dans le cas
d’un réseau électrique à sens unique, c’est ce qui se passe. La production
décentralisée, dans notre jardin, sur nos toits, remonte vers Hastière, via la
cabine-échangeur de Finnevaux où elle est injectée. Si elle « bute contre
l’arbre » et si elle ne peut pas être consommée avant Hastière , elle est
perdue.
Ainsi, en cas de pénurie sur les grosses
unités de production, l’électricité produite localement deviendrait inutilisable
à l’heure H, c’est un comble ! Certains imaginent même des compensations
financières pour ne pas produire (comme pour nos producteurs de pommes et de
poires qui peuvent les laisser pourrir sur place)... Comment expliquer une
telle absurdité? Une explication ! le programme de délestage aurait
négligé les petits producteurs connectés à la basse tension. Le distributeur n’a
pensé qu’en termes de haute tension. Sans faire la nuance et imaginer des
adaptations au réseau aux productions décentralisées renouvelables...
Aussi est-il urgent d’interpeller le gestionnaire du réseau pour adjoindre à ses compteurs
une « boîte noire » spéciale, dans chaque habitation.
Des solutions en effet existent pour
réduire ces risques de pénurie : la mise en place d’un réseau ‘intelligent’
qui combine la régulation du courant reçu et optimalise son utilisation. D’une
pierre deux coups: on peut être vraiment autonome et on épargne de l’énergie
donc de l’argent. Son coût est-il
supportable? Oui avec les économies d’échelle et grâce à la réduction de production/consommation.
Mais pour aboutir, il faut convaincre les gestionnaires de réseaux des
bienfaits de l’idée, réseau qui est toujours aujourd’hui pensé dans la logique
des grosses unités de production
centralisées.
Des éoliennes le long de l’autoroute
c’est bien, mais c’est très éloigné de mon salon. Une éolienne par village c’est
mieux, car quand le pays sera dans le noir moi je lirai mon journal en toute
sérénité. Il est temps d’y penser.
La pénurie, au lieu d’être une galère, stimule
les neurones, crée l’occasion d’être inventif, de contourner le problème. L’occasion
rêvée de penser en termes d’autonomie, avec des sources renouvelables et
accessibles pour tous ! Le vent et le soleil au secours des sinistrés du
délestage, un triller inattendu où les grincheux de l’énergie centralisé (pro
nucléaire) se convertissent et se mettent à sourire dans la lumière.
Blackout électrique, je ne connais pas!
Si... on adapte
le réseau électrique et le réseau de notre pensée.
3 octobre 2014
Bernard Delville, Président de la Fondation
Kids & Wind
http://kidsandwind.wordpress.com/fondation/