eoliennes: et pourquoi pas citoyenne?

Soixante personnes se sont réunies vendredi soir à Marilles pour entendre Bernard Delville expliquer les avantages de l'éolienne citoyenne.

L'ho mme est petit, trapu, rigolard, lucide, intelligent, concret. À l'heure où les magouilles et des «bisbrouilles» peuvent décourager le commun des mortels, voici un monsieur qui n'évite aucune question. Cela fait un bien fou. À voir et à entendre Bernard Delville, on se dit qu'il y a encore des gens entiers, honnêtes.

Dans son petit village de Mesnil-Eglise, près de Dinant, cet ingénieur est l'initiateur d'une Asbl nommée Vents d'Houyet.

Ces vents douillets ont fait participer les enfants du coin à un projet éolien. Avec leurs parents, après la création d'une coopérative, ils sont devenus détenteurs d'une éolienne de 800kW. Coût global de l'aventure: 200000€. Une grosse somme, mais la souscription de 2000 parts de 100€ a permis au projet d'aboutir. Et de fonctionner.

Autrement dit, les bénéficiaires disposeront bientôt d'une énergie verte qui ne leur coûtera plus un radis.

C'est tout cela que Bernard Delville est venu expliquer à Marilles à l'invitation du groupe Écolo. Il a été écouté avec attention.

Ensuite les questions ont fusé. Michel Marchal, de Noduwez, craint le bruit des éoliennes. «Je me souviens d'une information à propos du futur TGV, explique-t-il. On nous martelait que, sur son parcours, on n'entendrait rien. Cela s'est avéré totalement inexact.» À cela, Bernard Delville répond qu'effectivement, il est nécessaire de prévoir une zone neutre entre les habitations et une éolienne. Jamais moins de 500 mètres. Et qu'il est aussi nécessaire de respecter des distances entre parcs éoliens.

Frédéric Le Roux, de Piétrain, ingénieur civil de formation, était lui désireux d'installer une mini-éolienne dans... son jardin. «Et vous avez un permis d'urbanisme?», lui a demandé Bernard Delville. Non, effectivement, il n'en a pas.

Et son initiative, Frédéric Le Roux l'avoue, n'est pas du goût de ses voisins.

Olivier Laets, de Folx-les-Caves, est lui partant pour s'investir dans un projet semblable à celui de Mesnil-Eglise. «Le seul hic, ce serait de ne pas pouvoir réunir la somme. Mais il ne faut pas s'en faire, puisque si le projet devait échouer, on récupérerait son argent et les intérêts.»

Dans ce contexte, il était intéressant de connaître l'avis de Pierre Sondag, échevin de l'Énergie et de l'Environnement. D'autant qu'au conseil communal du 28 février 2008, on apprenait que des contacts avaient été pris avec la société Electrabel pour une éventuelle implantation de quatre éoliennes entre Noduwez et Libertange. «Rien n'est décidé de ce côté-là, confie Pierre Sondag, on n'en est qu'au stade des discussions. Mais si les conditions ne sont pas intéressantes, cela ne se fera pas. »

Reste une dernière question: puisque le site de l'E40 subit déjà des visées, n'existe-t-il pas d'autres sites éoliens potentiels à Orp-Jauche? «Non, répond Sondag. Car nous serions soit dans l'axe des couloirs aériens de Beauvechain, soit dans la zone d'entraînement des hélicoptères. Je voudrais du reste interpeller le fédéral à ce sujet pour adoucir les interdictions.»

Marc WELSCH actu24

Les Eoliennes sont notre pétrole vert

L'éolien doit profiter d'abord aux citoyens, selon BernardDelville , de l'ASBL Vents d'Houyet qui étudie un projet à Gouvy et Houffalize.

Bernard Delville, vous êtes le responsable de l'ASBL Vents d'Houyet. Vous projetez un parc de six éoliennes sur Gouvy-Houffalize et vous parlez d'une éventuelle participation citoyenne?

Pas éventuelle! Concrète. Notre propos, c'est l'économie solidaire, participative. Le vent, c'est le pétrole des citoyens. À eux de l'exploiter.

Les grands promoteurs éoliens, eux, ne partagent pas. Ce sont des financiers qui ne voient que leur profit.

Le risque, c'est que demain nos éoliennes deviennent russes ou chinoises. Avec cette vision de l'économie, on va dans le mur

Vents d'Houyet n'est donc pas un promoteur comme les autres?

Notre approche est radicalement différente. L'ASBL propose une formule mixte: un tiers de l'invest réservé aux communes, un second tiers aux citoyens et le dernier aux privés qui prennent le risque d'étudier l'implantation.

On vous sent très «frileux» à l'approche des autres promoteurs perçus selon vous comme des profiteurs. Vous menez un combat?

David contre Goliath. Il y a de l'argent et du pouvoir en jeu. Demain, l'octroi des permis d'environnement devra tenir compte des autochtones.

Il est temps de réagir et de ne pas être considérés comme des sous-développés à qui on veut spolier leur richesse.

Moi, je suis formel: pas d'éolien sans retombées locales significatives.

Nous irons en recours contre tous les projets privés qui ne proposent pas de compensations pour les riverains.

Vous proposez aux citoyens de devenir propriétaire d'une éolienne. Avec des bénéfices directs. Un rêve?

Regardez ce que se fait dans les pays scandinaves! Vents d'Houyet est partie d'une utopie et de zéro eurocent pour arriver jusqu'à présent à monter trois éoliennes, autant de coopératives citoyennes et des bilans qui font rêver.

Les communes aussi ont une carte à abattre?

Elles doivent s'allier et innover dans des contrats de vent identiques aux contrats de rivières.

Et choisir entre des investisseurs venus d'ailleurs ou des locaux.

Une éolienne de 2MW rapporte entre 80 et 100000€ brut par an avec une mise de fonds minimale à l'extraordinaire.

La commune ne met pas son budget ordinaire en péril! Elle investit pour le futur avec des fonds publics.

Des chiffres?

Nos chiffres sont directement accessibles aux coopérateurs. Les autres promoteurs n'ont pas la même transparence.

Une éolienne coûte 3millions d'euros. Combien de citoyens pour créer une coopérative?

Il faut un minimum de 500 familles prenant chacune une part de 260€, soit 130000€ pour une éolienne de 2MW produisant du courant pour 1200 ménages.

C'est suffisant. Si on ne rassemble pas la somme voulue, on refait le tour des souscripteurs pour proposer l'achat de plusieurs parts.

Et si ça ne suffit pas, on a une liste d'attente de coopérateurs extérieurs qui n'attendent qu'à investir car il n'y a pas chez eux de potentiel pour un parc éolien.

Mais notre idée de départ, c'est de donner la priorité aux locaux.

260€ pour une part! À combien évaluez le dividende de retour?

Les parts de 260€ donnent

un dividende de 6% assimilable à une ristourne sur une facture d'électricité.

Tous les profits supplémentaires sont distribués chaque année en avantages «Électricité» ou pour soutenir des projets décidés par l'assemblée des coopérateurs.

Concrètement, on propose à chacun de verser sa part sur le compte de la coopérative de Vents d'Houyet.

Pour les communes, les revenus devront être consacrés à des projets d'économies d'énergie à l'échelon local.

D'aucuns disent que faire croire à des bénéfices directs dans une telle opération, c'est jouer avec les sentiments des gens?

On ne parle pas de sentiment mais d'argent. En fin de compte, on propose à chacun d'investir dans un gisement de pétrole vert. Nous, on a offert une éolienne à 850 enfants.

Où est la manipulation?

Interview: Olivier LAMBERT actu 24